Un rendez-vous arrangé |PV Lord Cutler Beckett

Lady Chastity L.I Johnson arrivait à peine devant la porte du bureau de Lord Beckett, quelques minutes tout juste après l'heure convenue par son père. Ce vieux râleur essayait encore de la marier, cette fois à l'homme le plus influent de toutes les Caraïbes. Mais, là encore, Chasty refusait. Pourquoi la forcer à épouser quelqu'un ? Déjà, elle n'avait jamais voulu se marier. C'était clair, et elle ne changerait jamais d'avis là-dessus. De plus, tous les prétendants que son père lui avait présenté avaient été très vite mis à la porte par la jeune femme. Seule sa mère comprenait ce qu'elle subissait, mais hélas ! Que pouvait-elle donc faire contre la volonté de son époux ?

Autant sa mère avait été une femme dévouée corps et âme à un homme qu'elle n'avait jamais aimé, autant sa fille ne pouvait se résoudre à cette idée. Aussi, lorsque son père lui proposa - lui imposa, plutôt - d'aller rendre visite au meilleur parti de la ville, elle piqua une crise énorme, cassa des vases de procelaine et faillit même briser un miroir. La seule chose qui la retint fut qu'elle ne voulait pas écoper de sept ans de malheur. Enfin, après de longues tergiversation, son père finit, encore une fois, par avoir ce qu'il voulait, et ce fut sous bonne escorte qu'elle se rendit au fort de l'East Indian Trading Company. Là, les gardes assignés par son père afin d'être certain qu'elle se rendrait bien au rendez-vous convenu la conduisirent à travers un dédale de couloirs plus sombres les uns que les autres - mais où était donc la lumière du jour ? - jusqu'à une grande porte ouvragée. Là, un garde frappa quelques coups, entra lorsqu'il en reçut l'ordre et annonça la visiteuse.

"Lady Chastity Lena Ivory Johnson, fille de Lord Archibal Theodorus Johnson."

La jeune femme entra d'un pas décidé et bouscula allègrement le pauvre garde alors qu'elle venait tendre sa main au Lord pour qu'il la baise.

"Lord Beckett..."

Son ton était sec, froid, cassant. Elle n'était pas très heureuse d'être ici - merci papa ! - et cela se ressentait dans ses manières. Elle poussa un léger soupir, les yeux clos, avant de les ouvrir pour poser son regard sur le Lord. Jamais elle ne pourrait l'épouser. Ni le voudrait. Elle aurait pu être franche avec lui, lui dire qu'elle ne l'épouserait pas point final. Mais elle ne voulait pas affronter encore une fois la colère de son père. Aussi, à chaque fois qu'il lui présentait un soupirant, elle avait appris à le décevoir, voire même le dégoûter. Tout plutôt que de recevoir une correction par son père pour avoir haussé le ton envers un Lord. Elle s'installa dans un fauteuil proche d'elle et ancra son regard dans celui de Beckett.

"Savez-vous la raison de ma venue ?"

Il arrivait parfois qu'Archibal Johnson prenne rendez-vous avec des Lords pour sa fille sans même les avertir du but de cette entrevue. Peut-être était-ce le cas, aujourdh'ui...

Spoiler:

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Citation :: «Ainsi votre majesté, j'espère que ma demande sera prise en compte, auquel cas nous courrons à la catastrophe

Lord Cutler Beckett »

Je venais de terminer une lettre pour le roi, dans laquelle j'exprimais plusieurs demandes. Notamment la suppression de plusieurs taxes injustifiées pour lesquelles la Rose Noire m'avait si aimablement rendu visite. J'en profitais pour quémander un renforcement des effectifs militaires de Port Royal. Quitte à ce qu'ils soient incapables, autant qu'ils soient nombreux. Je soupirai, posai ma plume puis me massai les tempes. Quelle journée épuisante…Je courrai depuis ce matin d'un bout à l'autre de la ville et mes seuls moments au calme, je les passai à la paperasse.

D'ailleurs parlons en de ce matin…J'avais du assister à une réception de la haute société où Lady Leyan m'avait si aimablement invité avec pour excuse «Ça vous détendra milord!». Pour me détendre, j'aurais eu besoin de fermer les yeux sans être assaillis de ces visions cauchemardesques. J'aurais besoin de faire une pause, de dormir, de manger convenablement, d'oublier tous ces soucis. Et croyez moi, ce n'est pas une fête qui arrivera à me détendre. Au contraire, j'étais la alors que je pourrais être ailleurs…Enfin, il aurait été impolis de refuser.

{ Flash Back:

Un verre à la main, je souriais aux dames qui m'entouraient. Oh j'avais du succès, j'étais «Le meilleur partis de la ville» comme on se plaisait tant à le dire. Oui j'étais riche, oui j'étais directeur de la Compagnie des Indes, et alors? Si elles n'en voulaient qu'à mon statut, que c'était lui et non moi qu'elles pressaient contre leur cœur, je n'allais certainement pas céder à leurs avances. J'avais d'autres choses autrement plus importantes que ça de toute façon.

-Lord Beckett?

Entendre mon nom prononcé de la bouche d'un homme me sortit de mes pensées. Je me tournai vers lui, les sourcils froncés, cherchant d'où je pouvais le connaître.

-Il est rare de vous voir dans ce genre de réception.
-En effet, ma fonction a tendance à beaucoup m'occuper…Pardonnez moi mais, qui êtes-vous?
-Ah suis-je bête, j'en oublie les usages. Lord Archibald Johnson

Lord Johnson…Lord Johnson…Ah j'y étais! Cet homme avait la fâcheuse réputation d'essayer à tout prix de marier sa fille, toujours sans succès. Par pitié qu'il ne vienne pas me demander cela…

-Ah oui je vois…Comment allez-vous?
-Fort bien…Lord Beckett, je voudrais vous demander une faveur.
-Laquelle?
-Voilà…Ma fille est timide, et vous apprécie beaucoup…Auriez-vous l'amabilité de la rencontrer?
-Votre fille? Mais…Je n'ai jamais rencontré Lady Johnson…Comment pourrait-elle…?
-Je vous l'ai dis, c'est une femme timide! Je vous en prie, acceptez!
-C'est que j'ai beaucoup de travail en ce moment et…
-Oh vous trouverez bien un créneau dans votre emploie du temps, n'est ce pas?

Je soupirai discrètement et fis mine de réfléchir avant de finalement acquiescer.

-Très bien, je pourrais la voir demain, puisque vous…Enfin qu'elle, y tient tant.

Et tout heureux, il repartit vaquer à ses occupations à la fête.

{ Fin du Flash Back.

-Et je me retrouve maintenant avec une Lady supplémentaire dans les jambes, dis-je en soupirant, le destin est contre moi ma parole, ou cherche-t-il vraiment à me marier? En tout cas, pas avec la première venue et vu la réputation de cette demoiselle, sûrement pas avec elle…

C'est alors que la voix d'un garde m'interrompit

«Lady Chastity Lena Ivory Johnson, fille de Lord Archibal Theodorus Johnson.»

-Tiens, murmurais-je, quand on parle du loup.

Une femme assez belle quoi que vu la manière dont elle bouscula le garde, sûrement assez autoritaire fit son entrée. Elle me tendit sa main que par convenance je baisai avant de lui adresser un sourire.

«Lord Beckett...»

-Lui-même Lady Johnson.

Quel ton…J'avais pourtant cru comprendre qu'elle VOULAIT me voir, apparemment ce n'était pas le cas, vu ses manières.

«Savez-vous la raison de ma venue ? »

-Votre père m'en a touché quelques mots. Me disant que vous brûliez d'envie de me rencontrer mais que votre timidité vous empêchait de m'approcher…

Vu la réaction qu'elle eut, je compris bien vite que ce n'était pas le cas. Quelle plaie…Une vraie perte de temps! J'avais des papiers à remplir, une lettre à envoyer, des ordres d'exécutions à signer ainsi que ceux de réquisitions pour pouvoir les envoyer à Lady Leyan, qu'elle appose elle-même sa propre signature. J'avais un dossier à réécrire, un plan à mettre en place pour capturer la Rose Noire, trouver le cœur de William Turner –J'ignorais alors que c'était Lady Leyan qui en avait la garde- sans compter le reste!

-Et apparemment ce n'est pas le cas…Ecoutez, si votre père cherche à vous marier, soit, mais pas avec moi. C'est loin d'être dans mes projets pour le moment, j'ai bien trop à faire. Ma fonction n'est pas de tout repos, sachez le. Et je n'ai pas tellement le temps de m'amuser…Faites lui comprendre que vous êtes assez grande pour trouver vous même un mari et si vous ne souhaitez pas vous marier, faites le lui comprendre mais par pitié! On dit peut être que je suis le «meilleur parti de la ville» mais c'est faux.

Bien, ces choses mises au clair, je pouvais recommencer à travailler. Mais non suis-je bête! Et les usages! Cutler les usages! Je me devais d'être polis, car même si ce rendez-vous arrangé arrangeait tout le monde sauf nous, il ne me dispensait pas de politesse.

-Pardonnez moi, je manque à tous les usages…Du thé?

A la réponse de Lord Beckett, la jeune femme ne cacha pas sa surprise. Elle savait son père prêt à tout pour la marier, mais de là à aller la faire passer pour une admiratrice secrète du Lord, c'en était trop ! C'était décidé, fille de bonne famille ou pas, elle quitterait la maison d'ici peu pour partir vivre ailleurs, seule et responsable de ses actes. Alors qu'elle réflechissait à l'endroit où vivre, sachant que son père ne manquerait pas de lui couper les vivres, Beckett finissait sa tirade sur cet arrangement, qui semblait ne pas lui plaire non plus.

La jeune femme ne put s'empêcher de se montrer soulagée, et aussitôt son visage s'ouvrit, laissant apparaître sur les lèvres un éclatant sourire qui l'embellisait d'autant plus. Elle répliqua, heureuse, mais également inquiète de la suite avec son père :

"J'ai déjà tenter de le lui faire comprendre, mais il serait plus aisé pour un filou de se ranger dans le droit chemin. Mon père est aussi entêté que moi, et hélas nos points de vue divergent toujours."

Elle accepta ensuite une tasse de thé. Le liquide lui rappelait sa belle Angleterre, qu'elle avait quitté si jeune et qu'il lui tardait de retrouver. Peut-être rentrerait-elle vivre là-bas, qui sait ? Non. Elle avait une amie, ici à Port-Royal. Une seule. Lady Leyan...
Voulant se montrer polie, elle tenta de faire la conversation avec Beckett.

"Je crois savoir que vous connaissez l'une de mes amies, Lady Leyan..."

Le thé finit par lui être servi, et ce fut avec toutes les bonnes manières dignes d'une jeune femme de son rang qu'elle saisit la tasse, le petit doigt légèrement relevé sans exagération, et porta à ses lèvres le liquide brûlant sur lequel elle souffla doucement dans le but de le refroidir.
Elle reposa ensuite sa tasse et poursuivit :

"Lord Beckett, vous a-t-on déjà lu les lignes de la main ?"

Sa question, sans contexte particulier, était peu anodine. La jeune femme se demandait si cet homme appréciait l'ésotérisme. Il était toujours bon d'avoir un invité de marque lors d'une séance de spiritisme...

Spoiler:

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«J'ai déjà tenter de le lui faire comprendre, mais il serait plus aisé pour un filou de se ranger dans le droit chemin. Mon père est aussi entêté que moi, et hélas nos points de vue divergent toujours.»

Ainsi elle avait des divergence d'opinion avec son père? Comme tout le monde au moins une fois dans sa vie…Les parents voulaient toujours tout faire pour le bien de leurs enfants sans se rendre compte que ce n'était pas ce qu'ils voulaient. Que voulez-vous…Je n'allais rien dire de plus sur ce sujet, son père était comme il était, d'ailleurs j'aurais une discutions avec lui à ce sujet, car je n'appréciais guère que l'on me fasse perdre mon temps comme ça. Pensait-il que tout le monde n'avait que ça à faire? Rencontrer sa fille pour un mariage qui ne se fera jamais?

«Je crois savoir que vous connaissez l'une de mes amies, Lady Leyan...»

Lady Leyan…Qui ne connaissait pas ce joyaux, cette femme sublime, cette merveille de la nature? Cette femme à la fois si dure et si douce, animée par un ego surdimensionné et un égoïsme sans pareil ce qui pourtant contribuait à son charme…Lady Leyan, la terreur des petits pirates, ma chère remplaçante durant toute mon absence. Mais au fond…Qui ne la connaissait pas? Un arriéré de la société sans doute…

-Je la connais oui…Oh vous êtes une de ses amies? Elle ne m'avait encore jamais parlé de vous…Vous vous connaissez depuis longtemps?

Je m'en fichais un peu à vrai dire, tout ce qui m'importait c'était que cette fille s'en aille et que je puisse continuer à travailler, peut être même pourrais-je dormir un peu? Bien que cela relèverait du miracle, l'espoir fait vivre…Non?

«Lord Beckett, vous a-t-on déjà lu les lignes de la main ?»

Lire les lignes de la main, cet art que pratiquait les charlatans en tous genre que l'on trouvait beaucoup dans les sombres quartiers de Port Royal? Cette sombre foutaise qui disait pouvoir prédire votre avenir dans la lecture des lignes de votre main? Et pourquoi pas la boule de cristal, le spiritisme et le tarot pendant que nous y étions! Sur quoi étais-je tombé encore…Non seulement une Lady rebelle, totale perte de temps, mais en prime une illuminée notoire? Je croyais en beaucoup de choses mais les sciences occultes, très peu pour moi!

-Non.

Ça avait le mérite d'être très clair. Non on ne me les avait jamais lues et non on ne me les lirait jamais! A quoi bon de toute façon? Même s'il y avait une infime possibilité pour qu'elle puisse lire les lignes de ma main, je ne voulais pas savoir. Sans surprise, la vie deviendrait trop morne.

-Non et à vrai dire je ne crois pas en ce genre de choses. Pour moi ça n'a aucun sens. Je ne crois déjà pas à la notion de destin prédéfinis. Pour moi on ne peut jamais savoir à l'avance ce qui va nous arriver, car c'est influencé par nos choix et nos choix sont influencés par une quantité de facteurs totalement imprévisible. Je ne suis pas fervent des sciences occultes. Je crois en certaines choses comme les vampires –irait bien mal remarquez- ou autres mais ce genre d'idioties, pas vraiment, pardonnez moi.

Spoiler:

"Je
la connais oui… Oh vous êtes une de ses amies ? Elle ne m'avait encore
jamais parlé de vous… Vous vous connaissez depuis longtemps ?"

Cette simple réponse avait fait tomber le moral de notre demoiselle dans ses bas. Ainsi, Alecto n'avait jamais parlé d'elle ? A personne ? La jeune Lady sembla se flétrir alors qu'elle se recroquevillait dans son siège - elle s'était assise pour boire le thé - et baissait le regard. Elle murmura alors, comme pour elle-même :

"Je dois être de ces amies qu'il vaut mieux cacher, par honte..."

Elle savait Alecto portée sur l'apparence et les on-dit, mais de là à cacher l'existence de son amie d'enfance, c'était beaucoup. Mais elle n'eut pas le temps de s'appitoyer bien longtemps sur son sort car Lord Beckett répondit à sa seconde question. Le ton qu'il employa fut d'ailleurs assez sec. Elle fut néanmoins étonnée de savoir qu'il croyait aux vampires - êtres mythologiques par excellence - et qu'il mettait purement et simplement de côté les esprits et autres fantasmagories. La jeune femme releva la tête, un sourcil relevé en interrogation, et demanda, intriguée :

"Comment pouvez-vous croire en l'existence d'être tels que les vampires si vous ne croyez pas au reste du surnaturel ?"

Elle se leva et s'approcha du noble.

"Lord Beckett, Votre esprit est entrouvert, pourquoi refusez-vous de l'ouvrir complètement ?"

Avant qu'il n'ait pu réagir, elle lui avait pris la main et l'avait rapidement observée. Elle la lâcha rapidement et recula vivement. Elle semblait effrayée.

"Vous... Vous avez une âme si sombre... Votre vie sera semée d'embuches, et vous serez la cause de beaucoup de morts, chez vos ennemis comme dans votre entourage."

Elle se heurta au fauteuil, dans lequel elle se laissa tomber lourdement, le regard perdu dans le vague. Sa voix à présent n'était plus qu'un murmure.

"Vous finirez seul... Tout seul..."

Elle semblait décidément complètement folle. La jeune femme sembla se calmer peu à peu et reprit des couleurs, elle qui avait été pendant quelques secondes blanche comme un linge. Elle finit par lever les yeux vers Beckett. Dans son regard, on pouvait lire l'incompréhension. Que venait-il de se passer ? Avait-elle encore eu une vision ? Etait-ce son imagination ? Elle n'avait hélas pas les réponses, et personne ici, à Port Royal, n'était en mesure de les lui donner...